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Interview : Simone Piguet –Gillièron

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Montpreveyres

Ecrire pour que rien ne se perde

Six mois après le décès de son mari, Simone Piguet –Gillièron choisit l’écriture.
« Je te laisse t’envoler », un livre pour réussir à faire le deuil d’André.
Des mots pour se retrouver et partager encore un bout de chemin.

 

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« Le bonheur est la seule chose qu’on est sûr d’avoir lorsqu’on l’a donné » (Raoul Follereau)

Une histoire d’amour, une histoire de deuil et d’une rencontre entre l’absent et « celle qui reste ». On ne peut cesser d’aimer quelqu’un qui n’est plus et l’écriture peut être un lien. Comme attelés l’un à l’autre, le couple existe dans le regard du lecteur. Simone Piguet-Gillièron s’est reconstruite, son arbre de vie est bien enraciné. Les oiseaux viennent y chanter et les fleurs s’épanouissent à nouveau dans son jardin secret.

La maison est grande, l’endroit où elle se tient est au soleil levant. Une terrasse, que l’auteure partage l’été avec Kouakou, son perroquet du Gabon, et un chat. Les cartons et les papiers à trier font partie de son quotidien. Mettre de l’ordre dans « leurs » affaires et découvrir encore l’inattendu ou l’essentiel. L’avenir sans lui avec la fervente volonté de ne rien oublier.

« L’absence est un espace qui fait partie du lieu où je me tiens ». Que voulez-vous dire ?
En rassemblant pour écrire ce livre tout ce qui a fait notre « nous », j’ai compris que même dans les moments les plus difficiles il y a toujours quelque chose à découvrir. C’est ce qui nous construit et maintient la passion. L’absence, ce n’est ni vide, ni néant. C’est comme une bulle habitée dans laquelle je ne peux pas entrer car il n’y a pas d’ouverture. Ça ne me fait pas peur car c’est un espace d’amour.

Qu’avez-vous appris de vous pendant ce parcours face à la maladie de votre mari ?
Il y a eu en moi des possibilités insoupçonnées. Elles m’ont permis de mettre en place des centres d’intérêt, d’oser penser à après la mort, d’apprendre à ne pas culpabiliser. La vie en moi est bien présente et elle s’accroche. André m’a dit un jour : « Si je m’en vais, ce sera peut-être une occasion d’éclosion pour plusieurs d’entre vous ». Des mots qui sont inscrits quelque part. Ils me reviennent avec une sensation douloureuse de vérité.

Vous avez partagé votre mari avec les amis et avez éprouvé parfois le sentiment qu’on vous prenait de ces précieux instants. L’envie de ne l’avoir que pour vous ?
André m’a dit un jour : « Il n’y a pas que nous dans la vie. Il y a aussi tous les amis qui nous ont tellement donné. » Depuis, j’ai réalisé que c’est un cadeau que je pouvais lui faire, m’effacer et accepter qu’il ait le droit d’être au centre, avec les autres qu’il aimait tant. Ce n’est plus une frustration quand c’est accueilli avec le cœur ouvert.

Et demain, l’espérance d’une vie qui continue sans lui?
Il a fallu que tout ça finisse pour que je m’y retrouve, que je me retrouve et que je me permette de naître à nouveau. J’ai grandi et j’apprécie chaque instant. Je pense écrire encore et j’ai en moi une forme de foi qui me tient debout.

 

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Petite biographie

Simone, institutrice et André, instituteur, enseignaient dans deux villages de la même région du canton de Vaud. Ils se rencontrent en janvier 1953 et se marient en octobre 1954. En janvier 1959, juste après la naissance de leur troisième enfant, ils quittent la Suisse pour le Gabon. Ils y travaillent plusieurs années dans le cadre d’une mission protestante et, en novembre 1970, accueillent leur quatrième enfant. Ils rentrent définitivement en Suisse en 1976. André prend sa retraite en 1997. Entre 2004 et 2007, il écrit ses mémoires africaines tout en se battant contre la maladie qui finit par l’emporter, le premier jour de l’été 2008.

 
« Je te laisse t’envoler », Editions Ouverture 2010

Dany Schaer

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Dany Schaer - Journaliste-photographe

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