Ropraz – Espace de l’Estrée
André Sugnaux, peindre pour que personne ne reste au bord de
l’histoire
Une exposition qui raconte comment les victimes des goulags
sous le régime Stalinien se dressent dans la lumière. Des
milliers de déportés s’entrecroisent entre les barbelés.
Personne n’a survécu aux déportations, ceux qui n’ont pas été
tués ont l’âme éteinte, la douleur tue éternellement.
Pourtant cette exposition bouleversante n’est pas désespérée.
L’artiste bâtit son œuvre sur une vérité. « Je peins les
éléments de souffrance dans la lumière et recherche le côté
positif des choses dans l’intemporalité. J’utilise la technique
de l’icône, un fil rouge qui suit le destin de l’humanité et
plus particulièrement les injustices sociales et la violence.
C’est pour respecter l’histoire de milliers d’êtres humains
privés de liberté que l’on doit garder une trace des camps. Pour
que l’on se souvienne de la souffrance engendrée par les
rapports de force entre les hommes ».
La construction circulaire au centre de la galerie l’Estrée
permet de découvrir les maquettes du mémorial que l’artiste a
créé pour le Mémoral d’Alzhir qui fut l’un des goulags du
Kazakhstan.
Femmes violées, enfance bafouée, le système goulag engloutit
l’espoir, écartèle les cœurs et les âmes. Seul demeure le pardon
des Saints presque inacceptable. « Le peuple ne peut rien faire,
il a passé par le creuset de la purification. Et j’utilise la
lumière comme rédemption». La folie des hommes dénude
l’identité, le numéro 22245, déporté de Sibérie à la mer
blanche, dévoile la fragilité de l’être, ange il s’envole,
innocence déposée en linceul.
André Sugnaux est mandaté par le Département des Affaires
culturelles du Kazakhstan et la Direction du Musée National de
la Répression d’Alzhir pour réaliser la fresque de l’Histoire de
la Répression sous le régime Stalinien. L’architecture de ce
musée-enceinte pyramidale de béton telle une prison d’où une
seule ouverture libère la lumière venant du sommet de la
pyramide nous plonge dans la réalité de l’histoire du passé tout
en créant une écriture esthétique contemporaine. La fresque
d’imagerie figurative relate les faits historiques des
conditions de vie des victimes du Karlag et prison des goulags
femmes d’Alzhir sous le régime des répressions.
« La démarche que je poursuis avec Leonid Kolibaba n’est pas
scientifique. Nous suivons les traces de l’histoire, cherchons
des objets et faisons des photos. Notre projet est de réaliser
un ouvrage de dessins fait par des déportés ». Mais il faut
faire vite, les témoins disparaissent et avec eux le système
goulag se refermera en silence.
Petite bio
Après l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris,
l’Académie St-Roch, l’Académie Beaubourg et l’Ecole du Louvre, André
Sugnaux fréquente l’Atelier Kolibaba Etude de l’Icône Russe à
Chouvälova (Russie). Il est membre de VISARTE. Après de nombreuses
expositions en Suisse et à l’Etranger, il donne des cours à Fribourg
et Romont dans le cadre de l’Université Populaire et depuis 2001 à
l’Académie des Beaux-Arts Vera Muskina à St.Petersbourg. Depuis
2003, il adhère officiellement à l’Union des artistes russes. On
trouve aussi des œuvres monumentales de l’artiste en Egypte, plus
précisément au Caire et dans de nombreuses chapelles ou églises de
notre pays. Notamment à Siviriez, mosaïques de la Chapelle funéraire
et de la salle intercommunale. |
Espace de
l’Estrée, André Sugnaux, Artiste suisse à l’âme russe « D’un
monde ensoleillé à la répression », exposition ouverte tous les
jours de 14h à 19h jusqu’au 6 juin, sauf le mardi.
Dany Schaer
Paru dans le Journal de Moudon, mai 2011
|