Ropraz
René Sarasin, un destin entre aiguille et pinceau
Rencontre avec le Dr René Sarasin, spécialiste de l’oreille
interne. Une carrière consacrée à ses recherches sur
l’acupuncture originelle et sa profession de médecin-chirurgien.
A l’Estrée ce sont ses tableaux que l’on découvre. L’autre face
du personnage, plus secrète, comme à l’abri derrière la renommée
du médecin
Le village, comme tous les dimanches, a revêtu son voile de
silence. L’endroit est paisible, baigné de soleil. La petite
terrasse de l’Estrée, avec son air de Provence, invite à la
pause. Prendre le temps d’une boisson rafraîchissante. René
Sarasin apprécie l’endroit. Il nous parle médecine chinoise et
peinture.
Le carton d’invitation fait mention d’une phrase de l’artiste :
« Peindre, c’est vouloir donner de la vie, que ce soit par la
figuration ou non. Mais s’inspirer de la nature conduit à
l’admirer dans toutes ses expressions et enrichit l’esprit.
Donner de la vie n’en est alors que plus aisé ». Une enfance à
Bâle, un père artiste peintre qui décède alors que l’enfant n’a
que onze ans. Aussi loin qu’il s’en souvienne René Sarasin a
toujours peint. Sa passion mise entre parenthèses, il choisit
les études de médecine. Peut-être l’époque peu favorable au
choix des beaux-arts ou la vocation pour la médecine plus forte
que tout. La question reste ouverte.
L’acupuncture vous y croyez ? « Je n’ai pas besoin d’y
croire : je constate tous les jours que, oui, l’acupuncture est
une méthode thérapeutique efficace ». Le médecin parle de son
livre et CD « Une heure avec l’acupuncture originelle ». Un
ouvrage qui résume une recherche de plusieurs décennies et jette
une lumière nouvelle sur un savoir antique resté occulté. Nous
parlons aussi voyage et de son sport favori, le golf qui
sollicite tous les muscles du corps. L’ordinateur, outil
indispensable et contraignant et le pinceau cet ami silencieux.
Et les beaux-arts vous y croyez ? L’homme change de peau
et dans un soupire : « J’essaye de faire une peinture convenable
et c’est tout ! ». Il est temps d’entrer dans la galerie. Alors
que nous avons si peu parlé peinture j’en suis à me demander si
je vais découvrir des aiguilles ou des tableaux. Et là
l’émerveillement ! L’été, la chaleur, la couleur et des oliviers
à perte de vue. Trois étages sont consacrés à la beauté de
l’arbre qui s’épanouit dans la lumière. Il semble que l’on
pourrait entendre le bruissement des feuilles argentées dans ce
décor ocre aux multiples collines.
René Sarasin, né peintre, vit sa passion à l’abri des regards.
Le choix d’une carrière médicale aurait-il fauché dans l’œuf le
talent pour ne laisser place qu’au hobby? Alors que l’âme
s’évade, la main court sur la toile et exprime le non-dit. Je
sens comme une piqure d’amour propre en cet homme. Le
scientifique joue avec l’artiste sans jugement de valeur. Une
vie faite de compromis. Peindre oui mais la médecine reste La
Profession. La peinture, une passion avouable dès lors qu’elle
demeure à sa place, la seconde.
On ne peut décidemment que s’émerveiller de ce parcours sans
faute. Le médecin a tout mis en œuvre pour préserver cette part
si importante de sa vie. Comme un chef d’orchestre il dirige
carrière professionnelle, vie familiale et jardin secret parmi
ses toiles. Aujourd’hui, René Sarasin saisit la chance d’être
reconnu. « C’est ce qui m’a rendu fort, m’a ancré dans la
conviction que le talent ne doit pas être gaspillé. Mais le fait
que j’expose ici ne fait pas de moi un peintre meilleur ou plus
important. Il m’arrive de penser que le temps passe trop vite,
j’aurais voulu peindre plus ».
Dany Schaer
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Fondation Estrée, Ropraz, exposition du 2 au 31 juillet.
Ouverture tous les jours de 14h à 19h sauf le mardi.
www.estree.ch
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« Une heure avec l’acupuncture originelle » Dr. René Sarasin,
Editions Xenia
Paru dans le Journal de Moudon, juillet 2010
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